Les manifestations pulmonaires dans la sclérodermie systémique  

Par les Pr Yurdagul Uzunhan et David Launay

L’atteinte pulmonaire constitue une des atteintes viscérales les plus importantes de la sclérodermie systémique. Il s’agit d’une pneumopathie interstitielle diffuse le plus souvent fibrosante. L’atteinte concerne ainsi le poumon profond et va conduire à une altération des échanges gazeux responsable à terme d’une insuffisance respiratoire chronique. 

Cette atteinte est fréquente et concerne 40 à 60% des patients. Elle contribue à la mortalité des patients et impose une attention particulière visant à la détecter et à la prendre en charge de façon adaptée. 

L’interrogatoire du patient est essentiel pour rechercher des symptômes comme un essoufflement (dyspnée) à l’effort, une toux le plus souvent sèche, une fatigue qui peut être la conséquence de cette atteinte pulmonaire. 

Les examens utiles au diagnostic sont la radiographie du thorax, le scanner du thorax en haute résolution, les explorations fonctionnelles respiratoires et le test de marche des 6 minutes.  L’échographie cardiaque est également utile pour dépister une hypertension pulmonaire. 

Les éléments du traitement : 

Il est important de veiller à limiter l’exposition à des pneumotoxiques comme le tabac (proposer systématiquement un sevrage tabagique) et porter une attention particulièrement aux expositions professionnelles (silice, solvants). 

Une vaccination contre les germes responsables d’infections respiratoires est recommandée (vaccin anti-COVID19, vaccin anti-pneumococcique, vaccin anti-grippal). 

Le maintien de l’activité physique régulière est également conseillé. 

Une oxygénothérapie de déambulation peut être proposée selon les résultats du test de marche de 6 minutes. 

Le traitement médicamenteux vise à contrôler la maladie inflammatoire et comporte des immunosuppresseurs (mycophenolate mofetil en 1ère intention ou cyclophosphamide). Les anti-fibrosants peuvent être proposés pour freiner le déclin de la fonction respiratoire. En particulier le nintedanib a obtenu une AMM pour le traitement de la pneumopathie interstitielle diffuse associée à la sclérodermie systémique. Les biothérapies comme le tocilizumab et le rituximab sont des options thérapeutiques à discuter au cas par cas en réunion de concertation pluridisciplinaire comme indiqué dans le PNDS Sclérodermie systémique mis à jour en 2022. 

La transplantation pulmonaire est une procédure parfois envisagée dans les formes pulmonaires évoluées malgré un traitement bien conduit. Ce projet discuté avant l’âge de 65 ans nécessite un bilan précis des complications pour rechercher d’éventuelles contre-indications, telle une atteinte digestive sévère et non contrôlée.

Hypertension artérielle pulmonaire


L’HTAP, ou hypertension artérielle pulmonaire, est une complication possible de la sclérodermie systémique, qui touche les vaisseaux sanguins des poumons. Normalement, le sang circule facilement du cœur vers les poumons, où il est oxygéné. Mais dans l’HTAP, les petites artères des poumons s’épaississent, et deviennent plus étroites et plus rigides. Ceci provoque une élévation de la pression artérielle à l’intérieur des vaisseaux sanguins des poumons, d’où le nom d’HTAP. Cela oblige également le cœur, en particulier le côté droit, à travailler davantage plus fort pour envoyer le sang vers les poumons. Avec le temps, ce « surmenage » peut fatiguer le cœur et entraîner des symptômes comme un essoufflement, une
fatigue inhabituelle, des vertiges ou un gonflement des jambes. Chez les personnes atteintes de sclérodermie systémique, l’HTAP fait partie des complications justifiant d’un dépistage régulier. Ceci est généralement effectué au moyen d’une échographie cardiaque (encore appelée échocardiographie), qui permet d’apprécier de façon indirecte la valeur de la pression artérielle pulmonaire, ainsi que les dimensions du
cœur. Le suivi régulier permet de surveiller l’apparition de signes précoces, et d’initier rapidement un traitement adapté. Les principaux médicaments disponibles fonctionnent en dilatant le calibre des vaisseaux sanguins étrécis, ce qui permet d’améliorer la pression
artérielle pulmonaire, de ralentir l’évolution de la maladie et d’améliorer la qualité de vie.